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Chapdelaine quand il décrit l’arrivée de deux de ses compatriotes du Lac St-Jean. Et il ajoute : « Mais dès qu’il parlait, le fossé semblait s’élargir encore… »

Prenez une pièce de Bataille, de Bernstein, de Wolfe, de Porto Riche. Changez le site de l’action. Au lieu de Paris, mettez Montréal. Les sentiments paraîtront faux, les personnages invraisemblables.

Est-ce la confirmation de la théorie de Taine que le milieu forme la race ? Il y aide singulièrement. Le climat, et la conformation géographique d’un pays créent des besoins auxquels les habitants doivent d’adapter et cela influe sur leur sensibilité, leur caractère, leur tempérament.

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La littérature est la transcription des états d’âme privés et collectifs, l’extériorisation des idéals, la description fidèle et exacte des lieux, des coutumes, des mœurs. La littérature d’un peuple est tout à la fois son cerveau, ce par quoi il pense, son cœur, ce par quoi il ressent, son verbe ce par quoi il s’exprime.

Il n’y a pas deux individus qui pensent de même, qui ressentent de même, qui s’expriment de même. Il en est des peuples comme des individus. D’où la nécessité d’un nationalisme intellectuel.

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Au risque d’être taxé de sévérité excessive, je me permets d’émettre une assertion que je pose à l’état d’axiome : Nous n’avons pas encore de véritable littérature canadienne.

Nous avons bien quelques littérateurs, mais nous n’avons pas de littérature.