Page:Paquin - Le paria, 1933.djvu/28

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un journal, et deux portraits au fusain, de ces portraits impersonnels que des colporteurs font exécuter d’après des photographies agrandies.

Madame Jodoin mit la table pour le souper.

L’enfant avait le cœur gros. Il pensait à sa mère que des inconnus avaient emportée, après l’avoir couchée dans une boîte. Il pensait à la voisine qui le gardait, à la cour sale et poussiéreuse où il jouait, et tous ces êtres, et toutes ces choses qu’il ne reverrait plus, il les regretta. De sa mère, il ne conservait qu’un souvenir, la dernière image d’elle, dans la pâleur du repos final.

— T’as pas faim ? demanda Madame Jodoin, en contemplant l’assiette de soupanne encore intacte devant lui.

Les lèvres frémirent ; l’aile des narines se plissa, et tout à coup, des sanglots le secouèrent, et de grosses larmes perlèrent dans ses yeux, et, goutte à goutte, tombèrent.

L’homme et la femme se regardèrent, impuissants devant ce chagrin.