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Page:Paré - Lettres et opuscules, 1899.djvu/236

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lettres

yeux et la douceur de votre sourire ne… Mais je m’arrête, j’allais manquer à la galanterie. Mon Dieu ! comme on change avec l’âge !

Je me suis aussi aperçu de la chose cet été, surtout lors de mon dernier voyage à la Malbaie. L’odeur du varech m’a laissé froid ; je me suis fait cahoter, secouer, dans de dures calèches, tirées par des rossinantes qui n’avaient plus que les os, et quand je suis descendu, le plaisir ne gonflait pas mon cœur ; le soir, j’ai joué aux quilles avec fureur, et quand je me couchais, les os rompus, courbaturé, je ne me livrais aucunement à des transports d’enthousiasme ; on s’est raconté, entre amis, des plaisanteries qui durent depuis dix ans, et je n’ai pas ri aux éclats.

J’ai pêché la loche, et ce sport émouvant et plein de péripéties, m’a ennuyé. J’ai regardé d’un œil indifférent des jolies filles, en toilette claire, se bercer dans les hamacs, tandis que le feuillage agité faisait jouer l’ombre et le soleil sur leurs joues en fleur ; les mamans m’ont souri, et je suis passé sans m’arrêter, les papas m’ont offert des cigares d’un air engageant, et