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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/170

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ALEXANDRE DUMAS PÈRE.

justice douteuse. Non, l’argent n’est pas une dignité.

Car enfin pourquoi vous substituer, observe Mercedes, à la main de Dieu ? Pourquoi ruiner les familles, faire le vide dans les maisons, accaparer de longue main, puis maltraiter les fils avec la certitude de désoler les mères ? Est-ce de la justice, cela ? Et de quel droit ?

Par le droit d’individualisme féroce, caractéristique de ce xixe siècle, dont les rêves ne furent jamais purs de tout égoïsme. Les philosophes du xviiie siècle se retrempaient dans le sentiment d’humanité. Le romantisme n’est que le cri de triomphe de la bourgeoisie au pouvoir. Et comme ni les grands mots ni les grandes phrases n’ont jamais fait faute à ces gens-là, vers le sixième volume de ses manèges et de ses exécutions, à l’instant que le millionnaire superbe s’assied à la droite du Tout-Puissant, le doute entre en son esprit, le remords en son cœur, les dissertations métaphysiques enflent les chapitres, — parce que Dumas, qui s’était dépassé lui-même en son rêve frénétique, est néanmoins convaincu que les jouissances du cœur priment celles de la fortune. Enfin il disparaît sur son yacht aux voiles blanches, en compagnie de la douce Haydée, rompant avec le vieil homme et s’évadant de la société positive pour cueillir les roses de l’amour….

Et cela fait un beau conte, où l’imagination et la sensibilité des âmes simples sont copieusement assouvies, mais non pas en dehors de toute réalité morale prise sur le vif de l’écrivain et à la mesure d’une société dont l’unique affaire fut de s’enrichir.