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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/231

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DRAMES TRAGIQUES.

mettre à profit Marion de Lorme[1]. Au reste, cette pièce, d’une fantaisie invraisemblable, n’est pas d’ensemble. Imaginez Monte-Cristo versifié, avec des prétentions à la grande tragédie. Le vers, disait Stendhal, n’est souvent qu’un cache-sottise. Il est manifeste que Dumas ne s’en doutait point en écrivant l’Alchimiste.

Il y a aussi de beaux vers, et spirituels, et pittoresques, et passionnés dans Caligula. Il y en a ; je le répète pour les incrédules, moutons de Panurge, qui suivent aveuglément l’opinion commune. Destinée au cirque Franconi, cette pièce devint un drame tragique : le principal rôle était distribué à un cheval bien dressé[2] ; de la haute école Dumas s’élève jusqu’au sublime de Polyeucte sans sourciller. Avec quelques couplets de facture on en faisait une opérette ; avec quelques décors et quelques machines de plus, une féerie : l’auteur est homme de ressources. Par malheur, il n’avait qu’un moyen très imprévu de manquer son coup : d’une pièce de cirque il fit une tragédie.

Tout ce qu’il a pu glaner dans Suétone de détails pittoresques ou amusants, tout ce qui, ayant frappé son imagination, doit plaire aux yeux, y est ajusté avec bonhomie et traité avec esprit. Cela ne dépasse point les limites du drame populaire. Il veut atteler des chevaux au char de Caligula ; il s’étonne que la Comédie-Française se refuse à cette exhibition et allègue que les maîtres tragiques n’amenaient point de chevaux sur la scène[3]. En effet, il s’est trompé de théâtre. Il nous

  1. L’Alchimiste, V, sc. iv, p. 278. Le podestat met à la grâce de Fasio la même condition que Laffemas à celle de Didier. Marion de Lorme, III, sc. x, p. 268.
  2. Souvenirs dramatiques, t. I. Mon Odyssée à la Comédie-Française, § xii, p. 252.
  3. Souvenirs dramatiques, t. I. Mon Odysée à la Comédie Française, § xii, p. 260.