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ALEXANDRE DUMAS FILS.

Alors, c’est le penseur qui compromet une fois de plus le dramaturge. Même, si la pensée de M. Dumas est parfois indécente, tant elle est morale, il lui arrive d’être insondable, à force d’austérité. Les témérités de sa religion se perdent dans le mysticisme, s’offusquent de métaphysique, par delà les limites de la vraisemblance et de la clarté, dont nous avons constaté d’abord que l’homme de théâtre a le sens très affiné. L’imagination s’échappe, la fantaisie se donne carrière, aux dépens de l’observation et de la réalité dramatiques. Madame Aubray présente son fils à Valmoreau… « C’est que les âmes toujours pures, réplique d’emblée à un étranger qu’il voit pour la première fois l’interne évangéliste, font les âmes toujours jeunes ; c’est que la vertu triomphe même du temps. J’aime à entendre ce que vous venez de dire. Monsieur, (le monsieur l’espère au moins), et je l’entends souvent ; je suis si fier de cette mère-là (tout de suite, devant un inconnu). On nous prend partout pour le frère et la sœur, et, si ça continue, dans quelques années on nous prendra pour le père et la fille… Quand on nous rencontre bras-dessus bras-dessous dans la rue, on dit : « Oh ! le joli petit ménage. » — « En voilà une famille », — observe judicieusement Valmoreau. — « Vous en verrez bien d'autres » , repart Barantin. En effet, il n’est pas au bout de ses étonnements. Il verra que madame Aubray entre dans la vie des gens comme dans un moulin, ou, si vous préférez, comme dans une église ; qu’elle confesse tous ceux qu’elle rencontre, et qu’à tout pécheur elle remet les péchés, au prix d’un sermon expiatoire. Elle aborde Jannine dans un Casino de plage, pour la remercier d’un morceau de musique « que vous m’avez si gracieusement fait remettre. » — À genoux, mon enfant, récitez le Confiteor. — Mais, Madame, comme cela, sans préambule ? — Dites : ma mère, et voyez comme vous répondrez. Vous n’avez que cet enfant ? Vous l’avez eu bien jeune ? Vous ne songez