malheur à qui s’accompagnerait d’une autre bannière ; il ne pourrait venir de Dieu. »
Mordrain, en l’écoutant, sentait son corps pénétré de mille douceurs ; il oubliait qu’il était privé depuis deux jours de toute nourriture. « Pourriez-vous m’apprendre, » lui dit-il, « si je dois être tiré d’ici ou y demeurer toute ma vie ? — Eh quoi ! » répondit l’inconnu, « n’as-tu pas ta créance en Jésus-Christ, et ne sais-tu pas qu’il n’oublie jamais ceux qui l’aiment ? Il les chérit plus qu’ils ne s’aiment eux-mêmes ; comment, avec un si bon et si puissant gardien, s’inquiéter du lendemain ?
« Ne fais pas comme ceux-là qui disent : Dieu a trop affaire ailleurs pour avoir le temps de penser à moi, et s’il voulait s’occuper d’une si faible créature, il n’y suffirait jamais. Ceux qui parlent ainsi sont plus hérétiques que popelicans. »
Ces paroles jetèrent Mordrain dans une profonde et délicieuse rêverie. Quand il releva la tête, il ne vit plus la nef ni le bel homme qui la conduisait ; tout avait disparu. Combien alors il regretta de ne pas l’avoir assez regardé ! car il ne doutait plus que ne ce fût un messager de Dieu ou Dieu lui-même.
Tournant alors ses regards vers Galerne[1],
- ↑ Le nord-ouest.