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LES TROIS FUSEAUX.

Le premier était dressé au milieu du bois de lit. Du côté opposé s’en trouvait un autre dressé de la même manière. Un troisième était posé en travers du lit et comme chevillé aux deux autres. De ces fuseaux, le premier était blanc comme la neige, le second vermeil comme sang ; on eût dit le troisième fait de la plus belle émeraude. Ces couleurs ne devaient rien à l’invention humaine. Et, comme on pourrait douter de ce qu’on vient de dire, il est à propos d’en expliquer le sens et la véritable origine. Cela nous écartera un peu de notre sujet, mais l’histoire en est agréable à entendre ; d’ailleurs, de la connaissance de ces fuseaux dépend celle de la nef.

Quand Ève la pécheresse, prêtant l’oreille aux conseils de l’Ennemi, eut cueilli le fruit défendu, elle arracha de l’arbre, avec la seconde pomme, le rameau auquel elle était attachée. Adam la prit, et laissa le rameau entre les mains d’Ève, qui le garda sans y penser, comme il arrive souvent à ceux qui retiennent en main une chose qu’ils auraient aussi bien pu laisser tomber. À peine eurent-ils mangé le fruit, que leur nature fut transformée : ils se regardèrent, rougirent à la vue de leur chair, et se hâtèrent de couvrir de la main leurs parties honteuses.