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INTRODUCTION

à cette île d’Avalon, qu’on crut plus tard reconnaître dans Glastonbury.

Un dernier trait de la légende galloise de Merlin se retrouve dans notre poëme. Merlin et Talgesin exposaient à qui mieux mieux les propriétés de certaines fontaines et la nature de certains oiseaux, quand ils sont interrompus par un fou furieux qu’on entoure et sur lequel on interroge Merlin : « Je connais cet homme, » dit-il ; « il eut une belle et joyeuse jeunesse. Un jour, sur le bord d’une fontaine, nous aperçûmes plusieurs pommes qui semblaient excellentes. Je les pris, les distribuai à mes compagnons et n’en réservai pas une seule pour moi. On sourit de ma libéralité, et chacun s’empressa de manger la pomme qu’il avait reçue ; mais l’instant d’après, les voilà tous pris d’un accès de rage qui les fait courir dans les bois en poussant des cris et des hurlements effroyables. L’homme que vous voyez fut une des victimes. Les fruits cependant m’étaient destinés et non pas à eux. C’était une femme qui m’avait longtemps aimé et qui, pour se venger de mon indifférence, avait répandu ces fruits empoisonnés dans un lieu où je me plaisais à venir. Mais cet homme, en humectant ses lèvres de l’eau de la fontaine voisine, pourra retrouver sa raison. »