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LE ROI ARTUS.

palais une énorme truie dont les longues soies descendaient de ses flancs jusqu’a terre, et qui portait un cercle d’or entre les deux oreilles. L’empereur avait une idée confuse de l’avoir déjà vue, et même de l’avoir nourrie ; mais il ne croyait pas qu’il en eût la propriété. Comme il s’arrêtait à ces idées, voilà trois louveaux qui sortent de la chambre, et s’en vont courir sur la truie. L’empereur alors demandait à ses barons ce qu’il devait faire de la truie ainsi abandonnée aux louveaux. Les barons répondaient que la bête immonde devait être jetée dans les flammes. L’empereur alors tressaillit ; il s’éveilla, pour tomber dans une profonde rêverie ; mais, comme il était de sa nature fort sage, il ne parla de sa vision à personne. Le jour venu, il se leva, alla entendre la messe et trouva au retour les nappes mises et les barons qui l’attendaient. On se mit au manger ; l’empereur demeura rêveur, si bien que tous les convives se taisaient dans la crainte de le troubler et de lui déplaire.

Les tables n’étaient pas encore levées quand on entendit aux abords du palais un sourd bruissement. C’était un cerf de grandeur prodigieuse, portant cinq branches de cors, les deux pieds de devant d’une éclatante blancheur. Il avait couru dans les rues de Rome, comme s’il eût été chassé par une meute de