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MERLIN.

elle est libre de toute imitation grecque ou latine. On sent pourtant ici les tâtonnements du premier âge : le récit, dans la crainte d’être incomplet, avance pas à pas, ne fait grâce d’aucun détail, et n’ose franchir d’un bond les landes arides, pour se maintenir constamment dans les vertes prairies. Mais ces lenteurs donnent souvent un air de vie aux personnages, et nos yeux se complaisent à suivre leurs mouvements comme devant le rire et les jeux d’une réunion de beaux enfants. Plus tard, l’écrivain s’armera de ciseaux plus tranchants ; il sacrifiera mainte branche parasite, maint bourgeon inutile, pour donner à l’arbre plus d’élévation, de force, d’élégance mais les bourgeons et les rameaux tranchés avaient aussi leur beauté. Au moins est-il certain que, dans nos romans de la Table ronde, nous pardonnons aux répétitions, aux longueurs, et nous finissons par nous accoutumer à cette monotonie de formes qui n’arrêtait ni la séve poétique, ni les essors de l’imagination.

Plus nous suivrons les récits, plus les femmes y paraîtront fréquemment, et plus la part de l’amour sera grande dans les aventures. Mais les tableaux de l’amour heureux et satisfait n’empêcheront pas les auteurs de conserver je ne sais quel sentiment de chasteté exquise et de primitive innocence. Quelques mots çà et là