ne voulurent plus rester davantage. Cependant les juges convinrent de prononcer à quarante jours de là leur sentence. Le terme arrivé, la demoiselle se présenta, tenant l’enfant entre ses bras et déclarant, comme elle avait déjà fait, qu’elle ne connaissait pas celui qui l’avait rendue mère. « Mais, » dit le principal juge, « on prétend que cet enfant parle comme un homme d’âge : attend-il pour le faire que sa mère soit brûlée ? » L’enfant, se tordant alors aux bras de sa mère, fut mis à terre, et s’approchant du siége des juges : « Pourquoi, » dit-il, « voulez-vous brûler ma mère ? — C’est, » répond le juge, « parce qu’elle t’a conçu à la honte de son corps et qu’elle ne veut pas nommer celui qui t’a engendré. Nous ne pouvons violer la loi de nos pères. — Ce serait, » reprit l’enfant, « à bon droit, si elle avait fait le mal qu’on suppose, et si d’autres que l’on ne punit pas n’en avaient pas fait autant ou plus. — Nous la condamnons, » dit le juge, « parce qu’elle ne veut pas avouer ton père. — Je connais bien, » dit l’enfant, « de qui je suis fils, et votre mère sait mieux quel est votre père que la mienne ne sait quel est le mien. — Que parles-tu de ma mère ? » dit le juge, « je suis prêt à entendre tout ce que tu peux en dire. — Eh bien ! si tu faisais droite justice, tu la condamnerais la première. »
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