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Page:Paris, Paulin - Romans de la Table Ronde, tome 2.djvu/341

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LE ROI ARTUS.

grande surprise, se transporta dans les Gaules, entraîné par le désir qu’il avait de passer quelques jours dans les bras de Viviane. Il fut reçu avec de grands témoignages de tendresse. Viviane l’aimait véritablement, tout en ne voulant pas lui sacrifier sa virginité. Pour accorder ce double sentiment, elle avait, comme nous avons dit, fait un charme sur l’oreiller où Merlin posait sa tête, et ce charme lui représentait en songe les plaisirs qu’il croyait devoir à la tendresse de son amie. Merlin, son histoire nous en est garant, n’eut de commerce charnel avec aucune femme, bien que jamais homme ne les aimât tant que lui. Il y parut assez par l’abandon qu’il fit à Viviane de tous ses secrets, de celui-là même dont elle devait tirer contre lui un si fatal avantage.

De la forêt de Broceliande, Merlin se rendit en Northumberland près de Blaise. Après avoir fait un assez long séjour dans la forêt, il reparut encore à Logres. Son retour fut l’occasion d’une grande fête, tous les barons du royaume honorant à qui mieux mieux celui qui avait si bien mérité de la nation bretonne. En ce temps-là vint à la cour une demoiselle de grande beauté, montée sur une mule fauve, et tenant devant elle le nain le plus contrefait, le plus laid qu’on puisse imaginer. Il était camus et boursouflé, avait de longs sourcils roux et recoquillés ;