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LE LAID CHEVALIER.

avant deux sommiers, chargés de beaux et riches coffres. Quand ils furent descendus sous le pin, ils attachèrent leurs chevaux, défermèrent les coffres et en tirèrent un haubert blanc comme la neige, à doubles mailles d’argent, avec un heaume d’argent doré ; ils entrèrent dans la salle où mangeait le roi et s’arrêtèrent près de la demoiselle. « Sire, » dit celle-ci, « voici les armes dont mon ami sera revêtu ; ne tardez plus, je vous prie, car j’ai déjà trop longtemps demeuré. — Prenez auparavant place au manger, demoiselle. — Non, non je ne mangerai pas avant que mon ami soit chevalier. »

La demoiselle laissa sa main dans celle du nain, tant que le roi fut à table. Quand les nappes furent ôtées, elle tira de son aumônière un éperon d’or enveloppé dans un drap de soie ; puis elle dit au roi : « Sire, dépêchez-moi : j’attends depuis longtemps. Keu s’étant avancé dans l’intention de lui chausser l’éperon droit : — « Gardez vous-en, sire chevalier, » dit la demoiselle ; « nul autre ne doit mettre sur lui la main que le roi Artus, qui s’y est engagé ; mon ami est de trop haute condition pour être touché d’une main non royale. — Dieu me garde ! » dit Artus en riant, « vous avez raison. » Alors il lui chaussa l’éperon droit, ceignit l’épée, attacha le haubert et laça le heaume. Et, quand il fut armé, il lui donna la colée en disant :