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LE LAID CHEVALIER.

sur fautre, porte son écu à la hauteur de l’œil et pique son cheval des éperons par une ouverture pratiquée aux deux côtés de la selle ; car ses petites jambes ne s’allongeaient pas au delà. « Gardez-vous, chevalier ! » cria-t-il avant de fondre sur lui. « À Dieu ne plaise, » répond l’autre, « que je daigne jouter contre si chétive créature » Mais, tout en gardant sa lance droite, il eut soin de parer le coup avec son écu ; le nain l’atteint vigoureusement, perce l’écu, traverse le haubert et heurte le chevalier assez rudement pour lui faire quitter les arçons ; il tomba l’épaule démise. La douleur lui fit pousser un cri. Le nain, rappelant la demoiselle, la pria de l’aider à descendre : elle approcha, le prit entre ses bras et de là le mit à terre. Alors, tirant l’épée du fourreau, il vint au chevalier demeuré pâmé, lui délaça le heaume et menaça de lui trancher la tête s’il ne s’avouait vaincu. Le chevalier fut longtemps sans répondre. Le nain abaisse la ventaille, et quand le chevalier ouvre les yeux et voit l’épée levée sur lui : « Merci ! » cria-t-il. — « Rendez-vous, » répondit le nain, « ou vous êtes mort. — J’aime mieux mourir ; mais, sans prononcer ce vilain mot, j’espère en votre merci. — Il faut le prononcer ou donner votre vie. — Ah ! gentilhomme, je me rends ! je suis en ta merci ! — Eh bien vous irez