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les deux géants.

sur les épaules : elle plongeait les yeux sur les prés et les bois. Le bon chevalier, sortant tout à coup de sa rêverie, la regarde et retient son cheval pour la contempler plus longtemps.

Vint alors à passer un chevalier armé de toutes armes, qui lui demande ce qu’il a tant à regarder. L’autre ne l’entend pas et ne fait nulle réponse. « Je demande ce que vous regardez, » dit l’inconnu en le poussant du bras. — « Ce qui me plaît ; et vous n’êtes pas courtois de me jeter ainsi hors de mes pensées. — Je vous demande pourtant, par la chose que vous aimez le plus, quelle est cette dame que vous regardez si bien ? — C’est madame la reine. — Est-ce à vous de savoir quelle est la reine ? Bien m’est avis que vous ne regardez de ce côté que pour éviter de me parler. Après tout, auriez-vous le courage de me suivre ? – Oh ! répond le bon chevalier, si vous allez où je n’oserais aller, vous pouvez vous vanter de passer les plus renommés de prouesse. — Nous verrons bien. »

L’inconnu continue son chemin et le bon chevalier le suit. « Beau sire, lui dit l’inconnu, vous passerez la nuit chez moi, et demain matin nous irons où je vous ai dit. » Le bon chevalier se laissa héberger dans une maison qui longeait la rivière ; et, le lendemain de grand matin, il s’arme, sort avec son hôte, en