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guérison d’agravain.

bien dures ; nous aurions dû lui laisser une chance de guérison. — Eh bien, dit l’autre, je destine qu’il retrouve l’usage de son bras, quand le meilleur chevalier du siècle vivant l’aura humecté de son sang. — Moi, j’entends que la plaie de sa jambe se referme, quand elle sera arrosée du sang du chevalier qui approchera le plus du meilleur.

« Elles se perdirent dans le bois, et mon valet, ne pouvant les suivre, revint à moi tout ému. Il voulut m’éveiller, mais l’oreiller me retenait endormi, et je n’ouvris les yeux qu’au moment où, sans le vouloir, je le dérangeai et le fis tomber. Aussitôt je sentis de cuisantes douleurs ; ma jambe et mon bras étaient couverts de pus. Vainement j’essayai de remonter en selle ; l’écuyer disposa une litière, des gens de la forêt m’y étendirent et me ramenèrent à la maison. Depuis ce temps, je ne me suis pas levé, jusqu’au moment où, grâce à votre prud’homie, j’ai retrouvé l’usage de ma jambe. »

Agravain se tut ; mais la demoiselle à l’épée : « Je vous avais toujours dit qu’il fallait s’enquérir de monseigneur Gauvain, comme du premier des preux ; vous ne vouliez pas me croire, et vous souteniez qu’il y en avait assez d’autres qui le valaient. Agravain ne répondit pas, honteux d’avoir méconnu la bonté de son frère ; et Gauvain voulant détourner le propos : « Cette