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lancelot du lac.

légat de Rome, comme il l’avait été à celles de ses barons ; si bien que tout le royaume de Bretagne fut mis en interdit et demeura pendant vingt-neuf mois privé des Sacrements.

Mais il arriva qu’un jour la fausse reine, qui résidait à Bredigan, se sentit prise d’une grande douleur dans tous ses membres. Elle perdit ses forces ; ses pieds devinrent gonflés et remplis de pus ; il ne lui resta plus que l’usage des yeux et de la langue. Le roi manda les meilleurs mires de son royaume ; aucun d’eux ne sut découvrir la cause de la maladie ni les remèdes qu’on y pouvait opposer. Ce fut pour Artus un grand sujet de chagrin ; mais il avait soin de le dissimuler, sachant combien les prud’hommes de sa maison étaient peu disposés à partager ses inquiétudes.

Messire Gauvain lui dit un jour : « Sire, on vous blâme grandement de mener une vie si peu royale : vous paraissez éviter la compagnie de vos barons, tandis que vous étiez toujours prêt, autrefois, à donner le signal des divertissements. Nous n’allons plus en bois, en rivière ; les fêtes ne succèdent plus aux fêtes ; nous passons tout notre temps en sombres rêveries. — Vous parlez bien, répond Artus ; et j’entends changer de conduite. Demain nous partirons pour Kamalot ; nous irons en bois avec nos chiens,