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histoire de manassès.

dant qu’ils étaient à table, deux valets entrèrent, l’un fils et l’autre neveu de l’hôtesse. « Quelles nouvelles ? » demande la dame. — « Des plus mauvaises : mon père n’a plus à réclamer que vos prières pour son âme ; le duc Escaus fait préparer pour demain son supplice. »

La dame pâlit et devient plus morte que vive. « Qu’y a-t-il ? demande mess. Gauvain. — Sire chevalier, répond le valet, mon seigneur de père est un des vassaux du duc Escaus : durant la guerre que nous soutenons encore, le fils du duc fut tué par les gens du roi de Norgalles. Mon père, il n’était pas même avec ceux qui le frappèrent, fut accusé d’avoir eu part à sa mort parce qu’il avait eu, quelques jours auparavant, un entretien avec le jeune fils du roi. Le sénéchal de Cambenic se porta pour son accusateur, et Manassès, c’est le nom de mon père, ne put convaincre les barons de la cour de son innocence. Il ne pourrait, vu son grand âge, défendre lui-même sa cause contre le sénéchal, un des plus forts chevaliers de la contrée ; et la crainte que l’accusateur inspire a détourné tous les champions de se présenter contre lui : c’en est donc fait de mon seigneur de père. »

Pendant ce récit, la demoiselle fondait en larmes. « Bel ami, dit mess. Gauvain, retourne