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FRANÇOIS VILLON.

Voltaire qui en fait son profit, surtout dans ses œuvres de jeunesse, où on retrouve plus d’un tour et d’un trait de son célèbre compatriote.

Les premiers coryphées du romantisme donnaient à leur essor poétique une trop haute envergure pour le modeler sur le vol capricieux et saccadé du moineau parisien. Musset, dont Sainte-Beuve le rapproche un moment, et qui était imbu de Régnier, ne montre guère de traces de l'influence de Villon[1]. Mais la seconde génération s’éprit de cette poésie fantasque et pittoresque. Gautier, qui l’a si bien apprécié comme critique, a souvent cherché à reproduire le tour alerte et la couleur intense de ses vers. Les strophes sur les ossuaires des Innocents ont inspiré le Temple de la Mort et beaucoup d’autres poésies « macabres », tandis que les pièces consacrées aux filles de joie trouvaient écho dans les ripailles poétiques des « Jeune-France ». Banville goûta surtout la vive allure rythmique des strophes de Villon et la liberté primesautière de sa fantaisie ; il écrivit maint pastiche du vieux poète, dont il prétendit même réhabiliter la vie. Baudelaire en Villon aima ce mélange naïf d’attrait et de dégoût pour le vice qu’il exprima à son tour avec un art savant et singulier, dépourvu de toute naïveté. Plus récemment, c’est le bohème, le gueux, le souteneur même qui excita l’admiration d’une autre école. Verlaine fut un Villon moderne, qui, comme l’ancien, connut le vice, la misère et la prison, qui aima d’un amour

  1. J’en ai indiqué une plus haut : comme Villon dans ses Lais, Musset dans Namouna nous entretient d’un « chagrin domestique » et de sa bougie soufflée.