Page:Parnasse de la Jeune Belgique, 1887.djvu/116

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La Muse était la sœur auguste de l’Épée ;
Les strophes ressemblaient à de clairs escaliers
Où montaient, dans un faste et des feux d’épopée,
Des vers casqués d’argent comme des chevaliers.

Les poètes nimbaient la mémoire des princes ;
Plus d’un leur doit la pompe où sa majesté dort ;
L’empereur ébloui leur donnait des provinces
Et faisait à leur col flamber la Toison d’or.

Puis entre des soldats, des prêtres en étole,
Dans les flots d’un cortège écarlate de rois,
Il les menait cueillir la palme au Capitole,
Salués des drapeaux, des aigles et des croix !

Et le peuple, gardant au fond de ses prunelles
Leurs masques léonins parmi les encensoirs,
Contemplait longuement leurs ombres solennelles
Passer et repasser dans la braise des soirs.

Puisque je n’ai pu vivre en ces siècles magiques,
Puisque mes chers soleils pour d’autres yeux ont lui,
Je m’exile à jamais dans ces vers nostalgiques,
Et mon cœur n’attend rien des hommes d’aujourd’hui