Page:Pascal - Pensées, 2e édition G. Desprez, 1670.djvu/263

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viendront quand nous ne serons plus. Et nous sommes si vains, que l’estime de cinq ou six personnes qui nous environnent nous amuse et nous contente.

[§] La chose la plus importante à la vie c’est le choix d’un métier. Le hasard en dispose. La coutume fait les maçons, les soldats, les couvreurs. C’est un excellent couvreur, dit-on ; et en parlant des soldats, ils sont bien fous, dit-on. Et les autres au contraire ; il n’y a rien de grand que la guerre, le reste des hommes sont des coquins. À force d’ouïr louer en l’enfance ces métiers, et mépriser tous les autres, on choisit ; car naturellement on aime la vertu, et l’on hait l’imprudence. Ces mots nous émeuvent : on ne pèche que dans l’application : et la force de la coutume est si grande, que des pays entiers sont tous de maçons, d’autres tous de soldats. Sans doute que la nature n’est pas si uniforme. C’est donc la coutume qui fait cela, et qui entraîne la nature. Mais quel-