Page:Pasteur - Œuvres complètes, tome 6.djvu/27

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J’ai la satisfaction d’annoncer à l’Académie que nos expériences ont été plus heureuses. A diverses reprises, et souvent avec succès, nous avons inoculé le bulbe rachidien, et même la portion frontale d’un des hémisphères et le liquide céphalo-rachidien. Dans ces conditions, la rage a eu les durées d’incubation habituelles.

Le siège du virus rabique n’est donc pas dans la salive seule. Le cerveau le contient et on l’y trouve revêtu d’une virulence au moins égale à celle qu’il possède dans la salive des enragés.

Une des plus grandes difficultés des recherches sur la rage consiste, d’une part, dans l’incertitude du développement du mal à la suite des inoculations ou des morsures, et, d’autre part, dans la durée de l’incubation, c’est-à-dire dans le temps qui s’écoule entre l’introduction du virus et l’apparition des symptômes rabiques. C’est un supplice pour l’expérimentateur d’être condamné à attendre, pendant des mois entiers, le résultat d’une expérience, quand le sujet en comporte de très nombreuses. On apprendra donc, je l’espère, avec un vif intérêt, que nous sommes arrivés à diminuer considérablement la durée d’incubation de la rage et à la communiquer à coup sûr.

On arrive à ce double résultat par l’inoculation directe à la surface du cerveau, en ayant recours à la trépanation et en se servant, comme matière inoculante de la substance cérébrale d’un chien enragé, prélevée et inoculée à l’état de pureté.

Chez un chien inoculé dans ces conditions, les premiers symptômes de la rage apparaissent dans l’intervalle d’une semaine ou deux et la mort en moins de trois semaines. J’ajoute qu’aucune des inoculations ainsi faites n’a échoué. Autant de trépanations et d’inoculations sur le cerveau, autant de cas de rage confirmée et rapidement développée. Étant donné le caractère de la méthode, on peut espérer qu’il en sera toujours ainsi. D’ailleurs la rage a été, tantôt la rage mue, tantôt la rage furieuse, c’est-à-dire la rage sous ses deux formes habituelles.

Je me borne à ce court exposé, parce que nous n’avons d’autre but aujourd’hui que de prendre date pour la connaissance d’une nouvelle méthode de recherches dont la fécondité d’application n’échappera à personne.

Aussi, tout est prêt en ce moment dans mon laboratoire pour donner aux études sur la rage une grande extension (*).
* Cette dernière phrase ne figure qu’au Bulletin de l’Académie de médecine. (Note de l’Édition.)