Page:Pasteur - La Théorie des germes et ses applications à la médecine et à la chirurgie, 1878.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’expérience est plus remarquable encore lorsqu’on a déposé en un point central du morceau de chair une goutte de culture d’un vibrion à l’état de pureté, sans mélange d’autres espèces. — Le vibrion septique, entre autres, pénètre et se multiplie avec une si grande facilité, que chaque parcelle microscopique des muscles en offre par myriade ainsi que les corpuscules germes de ce vibrion. — La chair, dans ces conditions, est toute gangrénée, verte à sa surface, gonflée de gaz, s’écrase facilement en donnant une bouillie sanieuse dégoûtante. Quelle saisissante démonstration, quoique indirecte, de la résistance vitale, ou, pour me servir d’une expression tout à la fois et plus vague et plus claire, de l’influence de la vie pour combattre les conséquences si souvent désastreuses des plaies en chirurgie ! Cette eau, cette éponge, cette charpie avec lesquelles vous lavez ou vous recouvrez une plaie y déposent des germes qui, vous le voyez, ont une facilité extrême de propagation dans les tissus et qui entraîneraient infailliblement la mort des opérés dans un temps très-court si la vie, dans ces membres, ne s’opposait à la multiplication de ces germes. Mais, hélas ! combien de fois cette résistance vitale est impuissante, combien de fois la constitution du blessé, son affaiblissement, son état moral, les mauvaises conditions du pansement n’opposent qu’une barrière insuffisante à l’envahissement des infiniment petits dont vous l’avez recouvert, à votre insu, dans la partie lésée. Si j’avais l’honneur d’être chirurgien, pénétré comme je le suis des dangers auxquels exposent les germes des microbes répandus à la surface de tous les objets, particulièrement dans les hôpitaux, non-seulement je ne me servirais que d’instruments d’une propreté parfaite, mais après avoir nettoyé mes mains avec le plus grand soin et les avoir soumises à un flambage rapide, ce qui n’expose pas à plus d’inconvénients que n’en éprouve le fumeur qui fait passer un charbon ardent d’une main dans l’autre, je n’emploierais que de la charpie, des bandelettes, des éponges préalablement exposées dans un air porté à la température de 130 à 150 degrés ; je n’emploierais jamais qu’une eau qui aurait subi la température de 110 à 120 degrés. Tout cela est très-pratique. De cette manière, je n’aurais à craindre que les germes en suspension dans l’air autour du lit du malade ; mais l’observation nous montre