Page:Pasteur - La Théorie des germes et ses applications à la médecine et à la chirurgie, 1878.djvu/15

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constituer des affections aussi nouvelles par la spécificité de leur action que par la nature des organismes inoculés. La septicémie, par exemple, qui nous a occupés tout à l’heure, n’est pas la seule. L’air et l’eau renferment les germes d’un vibrion un peu plus gros de diamètre que le vibrion septique, plus rigide, moins flexueux, de mouvements plus lents. Nous décrirons ses effets dans une autre communication.

Les expériences suivantes font connaître encore une autre méthode de séparation des germes microscopiques. Elle rentre par quelques côtés dans celle dont il vient d’être parlé.

Que l’on prenne un morceau de chair d’un poids quelconque : pour fixer les idées, ce sera un gigot de mouton volumineux, et qu’après l’avoir rapidement flambé sur tous les points de sa surface extérieure, on plonge dans l’épaisseur des tissus la lame d’un bistouri également flambé ; que dans la fente ainsi pratiquée on laisse tomber quelques gouttes d’une eau commune ou qu’on y insère une petite bourre de coton qui aura été exposée au courant d’air de la rue ; puis qu’on recouvre le gigot d’une grande cloche de verre ; qu’enfin on fasse la même expérience à blanc, c’est-à-dire avec une même masse de chair flambée et quelques gouttes d’eau parfaitement privées de germes vivants, condition facile à réaliser en portant préalablement une eau quelconque à la température de 110 à 120 degrés. Si l’on considère que la chair musculaire absorbe facilement l’oxygène en dégageant un volume à peu près égal d’acide carbonique, on comprendra aisément que nos gouttes d’eau se trouvent comme ensemencées à l’abri de l’air atmosphérique, en présence d’un milieu de culture favorable au développement de certains germes. D’ailleurs, il est facile de remplir les cloches qui recouvrent la chair de gaz acide carbonique pur. Voici ce que l’on constate : en un jour ou deux au plus, à une température comprise entre 30 et 40 degrés, le gigot à eau pure ne montre d’organisme microscopique dans aucune de ses parties ; au contraire, celui à eau commune, alors même qu’il n’aurait reçu, par exemple, qu’une goutte d’eau de Seine, à plus forte raison une goutte d’eau d’égout, contient en chaque point de sa masse, et jusque dans tous les points de sa périphérie, des vibrions anaérobies plus ou moins rapides dans leurs mouvements et dans leur propagation.