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LETTRES INÉDITES, ETC.
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beaux traits de sa vie, et on comptait ses trophées. Il en avait élevé neuf pour autant de batailles gagnées par lui en commandant les armées de la république. Comme on le croyait déjà privé de sentiment, on ne pensait pas qu’il pût entendre ces discours. Mais il n’en avait rien perdu, et faisant un dernier effort, il trouva encore assez de voix pour dire : Tout cela est peu de chose ; d’autres ont pu en faire autant ; mais vous oubliez que jamais je n’ai fait prendre le deuil à un citoyen.

En un mot, il fut homme de bien et admirable dans ses mœurs, non-seulement par la douceur et l’équité avec laquelle il usa de son pouvoir, mais par le noble sentiment qui lui fit préférer cette-modération à toute espèce de gloire, et se vanter qu’aucunn’eût pu ni redoutersa haine, ni désespérer de l’avoir pour ami. Et ce n’est guère que par là qu’on peut excuser ce puéril surnom d’Olympien, qui ne saurait convenir à l’homme qu’autant qu’il unit avec la puissance le calme


imperturbable de la Divinité. Car être bon même aux méchants sans s’irriter de leurs offenses, ni de leur ingratitude, c’est proprement ressembler à Dieu suivant l’idée que nous en avons comme auteur de tout bien. Du reste, les Athéniens ne tardèrent pas à rendre justice aux rares qualités de Périclès, dont le regret fut augmenté par les événements qui suivirent sa mort ; car si quelques-uns le haïssaient vivant, il n’eut pas plutôt disparu que ceux mêmes auxquels son élévation avait fait le plus d’ombrage, lui comparant les orateurs et les généraux qui le remplacèrent, ne trouvaient en aucun d’eux une gravité si modeste ni une douceur si imposante ; et ce pouvoir tant calomnié sous les noms de royauté, de tyrannie sans fin et sans bornes, parut enfin ce qu’il était, une digue salutaire opposée par ce grand homme au débordementde la licence et des désordres qui depuis inondèrentla république.

A Lucerne, le 21 septembre 1809.

LETTRES INÉDITES,
ÉCRITES DE FRANCE ET D’ITALIE.
(1787 A 1812.)


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A MONSIEUR JEAN COURIER,
SON PÈRE.

Paris, le 28 avril 1787.

Vivat 1 mon cher papa, vivat ! Voilà des lettres comme je les demande ; voilà ce qui s’appelle écrire. En vérité, vous auriez eu une belle querelle si je n’eusse pas reçu de lettres de vous. Mais le succès a passé mes espérances, et je n’aurais jamais osé pousser mes vœux jusque-là. Une seule chose m’a mis en colère, c’est que vous ayez pu soupçonner que vos lettres m’ennuyassent, après tout ce que je vous ai dit. après. J’allais m’échauffer, mais quatre pages de mon papa suffisent pour me calmer.

Je suis tout consolé de la perte de mon serin, parce que je l’ai retrouvé. A la vérité, je ne me


serais pas allé pendre, mais j’aurais volontiers consenti à une plus grande perte pour recevoir des consolations comme les vôtres. Je ressemble aux amoureux pleins de chaleur qui ne peuvent se consoler de leurs pertes que dans les bras de leur maîtresse.

Nous n’avons pas plus eu de nouvelles de M. de la Frenaye que s’il n’eût jamais existé. M. Vetour a trouvé assez singulier qu’après l’avoir prié de lui garder une place, il n’ait pas reparu du tout. C’est une chose faite pour étonner, que ces gens qui vous paraissent occupés d’une affaire à n’en jamais sortir, et qui, l’instant d’après, ne s’en souviennent plus du tout.

J’ai fait mardi dernier le voyage de Sceaux, où j’ai vu de beaux jets d’eau, de belles statues et de beaux arbres bien taillés. Je crois que tout