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VIII
un cœur de jeune fille

Ce terrible problème et d’où dépendait l’honneur de leur nom ne se fut pas plutôt posé à Jean que les phrases énigmatiques de sa sœur lui revinrent à la pensée. Antoine était entré chez elle, cette nuit, dans une heure de détresse et de sincérité. Il ne lui avait pas seulement avoué sa faute. Il lui avait parlé des moyens de la réparer. Il lui avait demandé qu’elle s’associât à sa recherche de l’argent nécessaire. De quelle nature avait donc été cette offre pour que Julie en demeurât ainsi bouleversée ? Et derechef l’idée qu’il avait repoussée d’abord comme trop infâme s’emparait du jeune homme. Ces cinq mille francs, Antoine les avait empruntés à Rumesnil, en spéculant, pour les obtenir, sur les relations que celui-ci avait avec leur sœur. La révolte de la jeune fille provenait de ce qu’il avait voulu lui faire faire, à elle, la honteuse démarche.

— « Est-ce possible ?… » se disait-il en s’en allant du bureau où venait de se nouer un nouvel épisode du drame obscur dans lequel il se trouvait