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Page:Paul Féval L'Homme de fer.djvu/122

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— Voyez ! disait-il, voilà un duc Je suis son échanson. Ceux qui voudront ma protection n’ont qu’à parler ! Est-ce le roi Louis XI qui monterait ainsi à cheval ? Notre duc gagnerait sa vie à être homme d’armes !

Un murmure courait dans la foule, et c’était un murmure d’admiration. Les qualités physiques produisent une grande impression sur le vulgaire. Ce duc François, tel qu’on le voyait ici, était en conscience, le plus beau soldat de son armée.

— Et vous allez voir comme il joue de la lance ! reprenait le nain qui souriait, on ne savait pourquoi ; je suis son échanson, je connais ses talents. Tenez, le sixième chevalier après le duc, c’est le sire de Coëtquen, mon ancien seigneur. Je n’ai point de mal à dire de lui : bel éloge pour un maître. Holà ! Marcou ! Mathurin ! Pélo ! Tous les gens de Kergariou ! Voyez un peu là-bas, maître Jeannin qui a la colique !

Il y eut un grand éclat de rire. En ce moment même, Aubry apportait au pauvre écuyer une coupe pleine de vin.

— Je vis autrefois le duc François à Nantes, dit Mathurin sans dents ; sur ma part de paradis, il n’était pas de moitié si gaillard que cela ! Vous parlez de Jeannin : le duc ressemblait à Jeannin pris de colique, et, ce jourd’hui, le duc ressemble à Jeannin bien portant.

Mathurin sans dents obtint une huée de la foule, et trois bourrades de Goton, sa femme, à qui il faisait honte.

— Voilà ce qui arrive à ceux qui disent la vérité trop vraie, vieil homme ! murmura Fier-à-Bras ; écoutez-moi, vous autres, si vous voulez savoir du nouveau : j’ai occupé un logis dans la salière du roi Louis, et je sais comme il parle à son compère Olivier le Dain. Y en a-t-il un seul qui se puisse vanter d’avoir vu faire la barbe au roi ? Ah ! ah ! j’ai préféré ce matin l’honneur à la fortune, et je ne m’en repens point. Hier, vous me croyiez rôti ; de l’épreuve du feu je suis sorti grand seigneur. Bretagne-Malo ! Bretagne ! criez un peu pour empêcher les Normands de nous assourdir avec leur Montjoie ! Saint-Denis !

Une clameur générale, formée des deux cris de guerre rivaux, s’éleva au-dessus de la foule. Les trois escadrons qui