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Page:Paul Féval L'Homme de fer.djvu/163

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général, tout ainsi que si particulièrement et sur chacun point, en aviez fait serment spécial. »

Le roi avait beaucoup travaillé cette formule de serment. Il ne faut point dire qu’elle contient nombre de répétitions et de longueurs. C’était là l’enveloppe insipide et neutre qui permet d’avaler la pilule amère. Il faut avouer tout uniment que c’était un chef-d’œuvre de politique.

Quiconque acceptait cette chaîne dorés, se sentait aussitôt bel et bien garotté des bras, du cœur et de l’intelligence.

Le héraut Mont-Saint-Michel présenta au roi l’Évangile ouvert et la croix.

Le roi jura comme grand maître et souverain.

Le duc de Guyenne jura aux mains du roi ; le duc de Bourbon fit de même.

C’était au tour de François, duc de Bretagne, qui, une fois prisonnier, avait dû subir la volonté royale. Dès le soir précédent, François avait accepté l’ordre de Saint-Michel.

Il s’était tenu, durant toute la messe, sur le même rang que les ducs de Guyenne et de Bourbon. Entre la garde écossaise et lui, des hommes d’armes, à visière demi-baissée, s’étaient glissés peu à peu et par un mouvement insensible. Le jour était si sombre qu’on voyait à peine les visages de ceux qui portaient des chaperons ; sous le casque, les traits se perdaient complètement dans l’ombre.

Mont-Saint-Michel, le héraut, appela le nom du duc François de Bretagne. Personne ne répondit ; le duc ne bougea pas. Dans le silence qui suivit l’appel, on put remarquer un mouvement lent et continu parmi la foule compacte qui emplissaient le bras de la nef. Un large vide s’était fait derrière le duc de Bretagne.

Il était là, le fait est certain. Louis XI, le voyant à sa place, revêtu du costume d’apparat, ne prenait point souci des mouvements qui pouvaient avoir lieu dans la nef, et ne s’inquiétait guère de la répugnance manifestée par son très cher frère et bien-aimé cousin. Parfois, dans les mariages forcés, la pauvre épousée ne dit pas oui tout de suite. François