Page:Paul Féval L'Homme de fer.djvu/48

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après l’incendie fini, quand j’ai entendu Bruno la Bavette qui se disputait tout seul dans la plaine ; j’ai assisté à votre entrevue ; j’ai percé à jour tes projets et je les ai servis, parce que je suis un noble Breton, après tout.

— En quoi as-tu servi mes projets ? demanda Jeannin.

— Quand il en sera temps, je te conduirai moi-même au monastère et tu verras si la porte reste close devant moi !

— Je voudrais savoir…

— Point ! Demain matin nous causerons affaires. Le flux vient à six heures, je t’éveillerai. Dormons !

Jeannin eut beau l’interroger, il ne répondit plus qu’en ronflant. Le bon écuyer s’enveloppa dans son manteau, en ayant soin de protéger le nain qui était toujours sur ses genoux, et ses ronflements sonores accompagnèrent bientôt ceux de Fier-à-Bras. Il y avait longtemps que le soleil était levé quand Jeannin s’éveilla en sursaut, parce que l’eau du fleuve lui montait le long des jambes. Fier-à-Bras, ne voulant point mouiller ses chaussures, se mit à cheval sur l’épaule droite de l’homme d’armes. Ils regagnèrent ainsi la prairie.

— Mène-moi déjeuner quelque part, dit le nain, et je t’en apprendrai si long que tes oreilles tinteront comme la maîtresse cloche de Combourg.

— Il faut que j’aie auparavant des nouvelles de ma fille, répliqua l’écuyer.

— Je puis t’en donner, je viens de voir son gracieux minois à la fenêtre de l’hôtel du Dayron. Elle suivait de l’œil ces deux cavaliers qui vont disparaître là-bas dans la brume.

— L’un de ces chevaliers n’est-il point messire Aubry ? murmura Jeannin qui se fit de la main un garde-vue.

— Si fait, répliqua le nain.

— Et l’autre ?

— L’autre ?… Voici la seconde fois que je vois messire Aubry chevaucher côte à côte avec le diable.

— Mon cheval est ici près, s’écria Jeannin, je pars et je les aurais rejoints dans un quart d’heure !

— Si tu trouves leurs traces, dit Fier-à-Bras en éten-