Page:Paul Féval L'Homme de fer.djvu/87

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— Malepeste ! s’écria Louis XI qui jeta sur son confident un oblique regard ; nos secrets d’État courent-ils ainsi les chemins ?

— On en parlait ce matin même, et gaiement je vous jure, répartit le comte Otto, sous la tente de François de Bretagne.

Le roi croisa ses jambes l’une sur l’autre.

— Je ne l’avais dit qu’à toi, mon compère, murmura-t-il en se tournant vers maître Olivier le Dain.

— Sur mon salut éternel ! protesta celui-ci, je ne l’ai répété à personne !

— Les murs ont des oreilles, prononça gravement le comte Otto ; ainsi parle la sagesse commune. Moi je traduis cela ainsi l’air a des esprits. Écoutez !

Il toucha de main, armée d’un gantelet, un des donjons d’argent qui composaient la salière. Un soupir s’exhala. Ni le roi, ni le Dain, n’eussent su dire d’où venait le bruit. Le Dain joignit les mains en tremblant ; Louis XI se signa ostensiblement.

— Comte, dit-il, si les esprits de l’air sont à vos ordres, obtenez d’eux qu’ils nous laissent en repos. Les magiciens du pharaon d’Égypte purent changer leurs baguettes en serpents. Ne faites rien pour me prouver votre pouvoir occulte : j’y crois. Répondez-moi seulement voulez-vous accomplir mon souhait ?

— Si Votre Majesté daigne accomplir le mien, répliqua l’Homme de Fer.

— Parlez.

— Je parlerai quand je serai seul avec le roi. Louis XI n’hésita pas. Il plongea sa main sous le revers de son surcot et prit son saint Michel d’or, qu’il posa sur la table entre lui et le comte Otto. Gardé ainsi par l’archange, il fit signe au barbier de s’éloigner. Maître le Dain obéit avec une merveilleuse prestesse ; la peur lui donnait des ailes.

Nous ne saurions dire si le roi avait peur. Les choses surnaturelles agissaient sur lui très vivement ; mais il se possédait en perfection. Dans tous les cas, si le diable l’effrayait,