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Page:Paul Féval L'Homme de fer.djvu/96

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— Volontiers, messire, répondit le nain ; cela me comblera de joie.

— Je t’achète : fixe le prix.

Le nain prit un air grave.

— Messire, dit-il, ces choses ne s’expriment point en termes si francs. On ménage la fierté des gentilshommes. Je serai de votre parti moyennant que vous m’offrirez d’honnêtes étrennes ; mais, plutôt que de me vendre, je gratterais la terre avec mes ongles !

— Fixe donc tes étrennes ! répéta le comte Otto en riant. Fier-à-Bras établissait un calcul à l’aide de ses doigts maigres et longs.

— Deux et deux font quatre, dit-il, et deux six. L’an a trois cent soixante et cinq jours, qui, multipliés par six, donnent deux mille cent quatre-vingt-dix. Je vivrai bien encore quarante années, étant de bonne et saine constitution. Mettons cinquante pour ne point être pris au dépourvu dans la vieillesse. Deux mille cent quatre-vingt-dix répétés cinquante fois, donnent, si je ne fais erreur, cent neuf mille cinq cents… Ce sont des sous tournois qui produisent en livres, cinq mille quatre cent soixante-quinze, et en écus d’or nantais quatre cent cinquante-sept et demi…

— Tu es un géant pour le calcul, ami Fier-à-Bras ! s’écria le comte émerveillé.

— Avant de servir mon seigneur actuel, le sir de Coëtquen, répliqua l’Araignoire, j’allais dans les assemblées et foires, et je gagnais ma vie à supputer sans parchemin ni plume, par la seule puissance du souvenir. Je pense qu’un gentilhomme ne déroge pas pour cela.

— Certes… et que veux-tu faire de tes quatre cent cinquante sept écus nantais et demi ?

— Quatre cent cinquante-huit, messire, car il faudra un demi-écu pour l’acte.

— Quel acte ?

— Acte authentique sous votre bon plaisir, passé entre moi et dame Lequien, du bourg d’Ardevon, agissant pour elle