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Page:Paul Féval L'Homme de fer.djvu/95

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— Glorieux archange, dit-il en achevant sa prière, j’ai compté sur votre aide pour trouver un moyen de ne point tenir ma promesse, car ce serait sacrilège que d’introduire un pareil homme dans la frérie qui portera votre vénéré nom.

Dans la plaine, le comte Otto, Nasboth et l’écuyer couraient ventre à terre. La tête volumineuse du nain soulevait le manteau de l’Homme de Fer.

— Esprit ! dit celui-ci qui riait sous sa visière baissée, je t’avais vu rôder ce matin autour de la tente du roi, et quand je suis entré je t’ai entendu souiller dans ta prison… Rends grâce à ma fantaisie, car tu étais pris sous le couvercle comme en un traquenard !

— Tant qu’il vous plaira, monseigneur, je vous rendrai grâces, répliqua l’esprit Nasboth.

— Je te reconnais, reprit Otto Béringhem, tu es le nain Fier-à-Bras, le fou du sire de Combourg.

— Moi, je vous reconnais aussi, monseigneur, vous êtes Olivier, baron d’Harmoy, raconteur de belles histoires.

— Retourne à Chaussey, Sélin, dit le comte à son écuyer ; dix lances de renfort et la grande barque sous Tombelaine !

L’écuyer piqua des deux dans la direction de la grève. Le comte poursuivait sa route vers la rive du Couesnon, où était sa tente.

— Pour qui besognes-tu ? demanda-t-il au nain ; pour ton seigneur le sire de Coëtquen ? pour le duc de Bretagne ?

— Non point, messire ; j’étais là pour rendre service au bon écuyer Jeannin, que j’appelle mon oncle… Vous savez, le père de Jeannine la brunette.

— Tu es un espion adroit et hardi.

— S’il vous plaît, messire, je suis un pauvre gentilhomme, cadet de famille et sans apanage. Je fais ce que je peux pour vivre honorablement.

Le comte souleva le devant de son manteau pour voir un peu ce gentilhomme qu’il avait sous le bras.

— Veux-tu que je fasse ta fortune ! demanda-t-il brusquement.