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Introduction


un certain côté, un fait social. Car l’individu, quand il prend conscience de ce sentiment, ne se réfère pas seulement à une opinion purement subjective ; il invoque la vérité et la justice. Il prétend se dépasser lui-même et parler, en son for intérieur, au nom de la conscience collective. L’obligation morale, les rites et les dogmes de la religion ont, eux aussi, leurs aspects individuels et subjectifs. Ce sont cependant des institutions. Le sentiment que j’ai de ma propre responsabilité est une application, de caractère particulier, d’une règle sociale de responsabilité. Son analyse intégrale suppose évidemment l’intervention de la psychologie. Mais, à condition de négliger ce qui est purement individuel en lui, ce sentiment, comme cette règle, ressortissent à la sociologie.

Nous venons de déterminer sommairement les faits que nous nous proposons d’étudier. Il faut maintenant les définir avec précision, c’est-à-dire constituer le groupe naturel de phénomènes qui, abstraction faite de toute prénotion sur leur nature profonde, ont en commun des caractères très apparents et qui sont sûrement des faits de responsabilité.

II

Dans l’ordre des phénomènes juridico-moraux, les faits de responsabilité occupent une place précise. Les règles de responsabilité font partie intégrante du système de ces faits qu’on appelle des sanctions. C’est quand il s’agit de faire fonctionner ce système, d’appliquer des sanctions, et notamment des sanctions pénales ou morales, que la responsabilité intervient : sans elle le mécanisme des sanctions ne pourrait pas jouer. En effet, les règles et jugements, que nous avons donnés en exemples, prononcent qu’une condamnation, pénale, civile ou purement morale, doit frapper telle catégorie