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Page:Paul Leroy-Beaulieu,Le travail des femmes au XIXe siècle,1873.djvu/12

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documents de l’époque, où ces avantages sont mis au jour et où l’on fait ressortir la supériorité du travail aggloméré sur le travail dispersé.

Non-seulement l’atelier commun existait bien avant le dixième siècle, mais il présentait beaucoup de points de ressemblance avec l’atelier de manufacture que nous avons sous les yeux. Dans les manses seigneuriales peu importantes, le gynécée était sous la direction de la femme du seigneur, qui prenait part aux occupations des serves, leur distribuait les tâches et surveillait le travail : mais dans les manses plus considérables et dans celles qui dépendaient des abbayes, c’était l’intendant (villicus) qui présidait aux travaux des femmes ; c’était lui qui fournissait la laine, la garance, le vermillon, les peignes, les cardes, le savon et qui veillait à ce que l’ouvrage fût achevé en temps utile. Ce villicus était une sorte de contre-maître, et on lui adressait les mêmes reproches que l’on fait à beaucoup de nos contre-maîtres actuels, celui d’abuser de leur autorité pour séduire les femmes qui se trouvaient sous leur direction. Le gynécée eut bientôt une détestable réputation morale. Les femmes qui le composaient étaient accusées de n’avoir aucun respect pour elles-mêmes, aucun sentiment de pudeur, aucun attachement à la vertu. Les règlements et les lois se préoccupèrent de cette démoralisation des femmes serves occupées dans l’atelier commun ; mais leurs prescriptions ne semblent pas avoir produit grand effet : dès le neuvième