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Page:Paul Leroy-Beaulieu,Le travail des femmes au XIXe siècle,1873.djvu/133

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du travailleur et que, les besoins de la femme étant inférieurs à ceux de l’homme, il est naturel que la rétribution de celui-ci soit supérieure à la rétribution de celle-là. Cette explication nous paraît fort insuffisante. Ce ne sont pas du tout les besoins du salarié qui déterminent le taux du salaire. Une preuve évidente de la fausseté de ce prétendu théorème, c’est que les besoins de l’homme et de la femme ne sont pas une quantité constante. Ici le besoin, c’est de manger de la viande deux fois par jour ; là, c’est d’en manger les jours fériés ou deux fois par semaine ; plus loin, c’est de manger des châtaignes ou de la galette de sarrasin. Ici, ouvrier à besoin de bons vêtements bourgeois ; ailleurs, il se contente de guenilles. Bien loin que le besoin soit la cause et la règle du salaire, c’est le salaire qui est la cause et la règle des besoins et qui leur permet de se développer et de se produire. Si la différence des besoins était la seule ou la principale cause de l’inégalité des salaires entre l’homme et la femme, cette inégalité ne serait pas aussi grande. La différence des besoins pour les deux sexes n’existe, en effet, que pour la nourriture ; car l’on admettra que le logement, l’habillement, le chauffage, coûtent à peu près aussi cher à la femme qu’à l’homme. Il est impossible de supposer que la nourriture prenne plus de la moitié du budget même le plus réduit ; on ne peut, d’un autre côté, évaluer à plus d’un tiers la différence entre la nourriture nécessaire à une femme et la