Aller au contenu

Page:Paul Leroy-Beaulieu,Le travail des femmes au XIXe siècle,1873.djvu/40

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

procédés mécaniques pour faire le tulle Bobin, qui eut à partir de 1809, et surtout depuis 1823, une vogue si extraordinaire et compromit si gravement le travail de la dentelle à la main : ainsi, l’on fabriqua à la vapeur, dans de vastes ateliers, ces tissus si légers qui réclamaient auparavant des soins si laborieux et si patients. La machine d’Heathcoat, subissant la loi de l’industrie, ne cessa de se perfectionner. Elle exigeait 60 mouvements pour faire une maille, on réussit à faire la même maille avec 6 mouvements. Une bonne ouvrière ne fait, avec le fuseau, que 5 mailles à la minute : certains métiers circulaires font 30,000 mailles dans le même temps. Cette fabrication de tulle sembla un moment suspendre le travail de nos dentelières. Alençon qui, en 1788, comptait 9,000 ouvrières et produisait pour 4 millions de francs de dentelles, n’avait plus que 200 ouvrières en 1840 et ne faisait plus que 30,000 francs d’affaires. Alençon s’est relevé depuis : l’extrême bon marché du tulle a rendu l’essor à la dentelle à la main ; mais les métiers et les procédés mécaniques ont fait de nouveaux progrès. On s’est efforcé d’appliquer au métier à tulle le jeu des cartons à la Jacquard et de couvrir le réseau uni de dessins variés : on a réussi dans cette tâche. Saint-Pierre-lès-Calais a développé l’œuvre de Nottingham. L’on est parvenu à imiter, avec une perfection relative, les dentelles vulgaires. De grandes maisons de Paris ont obtenu de la dentelle courante traitée mécaniquement et qui ne diffère pas de la dentelle à la