Page:Paul Sébillot - Littérature orale de la Haute-Bretagne.djvu/59

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ment un chien, un ânon, un veau et un jeune poulain.

Mais il vint un septième enfant : Gargantua arriva juste au moment de l’accouchement et demanda le nouveau-né. La nourrice, qui n’avait rien préparé, se trouva fort embarrassée ; heureusement, elle vit une grosse roche, l’emmaillotta et la présenta au géant[1]. Mais la pierre, qui était forte, brisa une dent à Gargantua, qui entra en colère et voulut donner un coup de pied à la nourrice. Celle-ci s’esquiva ; le coup porta à faux et enfonça la plaine de Mordré ou Mordreuc. Gargantua rendit la dent, qui se piqua dans le sable.

Il alla du côté de Saint-Malo, et, sentant quelque chose qui le gênait dans son soulier, il en tira un gravier qui est le rocher de Bizeul.

Le bloc le gênait sur l’estomac, et il avait soif ; comme il se trouvait en mer, il voulut boire, et aspira si fort l’eau, qu’il avala une flotte anglaise qui croisait par là, et il s’en aperçut à peine. Mais, au bout de quelque temps, il sentit comme des crochets de fer qui lui déchiraient l’estomac ; il revint au continent pour consulter son médecin sur les bruits sourds qu’il entendait dans son estomac, et, par son conseil, il se décida à aller aux Indes.

  1. Cf. la fable hellénique de Saturne dévorant ses enfants.