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Page:Paul Vibert - Mon berceau, 1893.djvu/298

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mon berceau

leur de macchabées en manière de conclusion, l’enterrement fini. — Allons prendre un verre ; cette chienne de gelée me creuse.

Et l’on retourna prendre le coup d’adieu chez le chand de vins.

Ils n’étaient pas méchants ces trois hommes, et l’aventure les avait tellement émus, qu’ils pleuraient comme des veaux, en vidant leur verre de rhum.

En rentrant le soir l’homme se dit :

— C’est demain Noël, je vais acheter quéque chose pour les mômes, et il leur acheta, au bazar de l’Hôtel-de-Ville, une catin en carton de quatre sous.

Une fois chez lui, il trouva sa femme morte de froid et d’une péritonite, et les gosses, les yeux dilatés, effarés, pleurant silencieusement devant l’âtre vide.

D’un coup d’œil il comprit la chose, il coucha les enfants, après leur avoir donné le dernier morceau de pain, en se disant à lui-même :

— C’est toi, salaud, poivrot, propre à rien, qui as tué la femme !

Ses larmes tombèrent sur la tête des petits qui gentiment embrassèrent leur père, semblant comprendre sa douleur et ils s’endormirent.

Cela fait, le pauvre homme retira ses souliers pleins de neige fondue, les mit dans la cheminée,