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j’aime mieux renoncer à Meneghe que de vous déplaire.

Le petit ânier avait des prétentions. Ces souvenirs m’agitent encore trop dans ce moment pour que je puisse vous raconter la scène burlesque qu’il vint me jouer en demandant intrépidement la main de ma fille adoptive. Je le menaçai de coups de bâton, et il s’esquiva.

En face de ma maison de campagne était une chaumière habitée par une jeune fille orpheline d’une rare beauté. Elle s’appelait Angelica, ce dont on faisait Cangé, car il faut toujours raccourcir ou modifier les noms dans ce pays-ci. C’était une vraie Sorrentine, brune, élancée, d’une physionomie sérieuse, avec des bras d’ivoire et des yeux démesurés. Elle ornait sa misère avec un collier de graines de sorbier, un chapelet de noisettes et une coiffure de feuilles de myrte. Au rebours du précepte, elle ne faisait rien pendant la semaine que rêver à sa fenêtre, et le dimanche elle sortait de son apathie pour danser des tarentelles à se briser les jambes. Meneghe vint à passer