Page:Paul de Musset - Course en voiturin, Italie et Sicile, 1845, 1.djvu/58

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 50 —

chef-d’œuvre ; toute la ville parla de ce jeune homme, qui rapportait de Rome la pureté de dessin et la suavité d’expression du siècle précédent. Les grands seigneurs accoururent chez lui ; les commandes se succédèrent, et Pellegrino se mit à travailler assidûment.

Il y avait alors à Gênes deux peintres en vogue, appelés les frères Carlone, que leur talent aurait dû préserver d’une basse envie, mais dont l’orgueil surpassait encore le mérite. Ils prétendaient ressusciter la peinture dans leur pays, comme les Carraches à Bologne, et voulaient bien avoir des élèves, mais non pas des rivaux plus habiles qu’eux. L’arrivée de Piola et le succès de son premier tableau leur causèrent un chagrin profond, qu’ils dissimulèrent en accablant le débutant de caresses et d’éloges. Comme ils étaient riches et célèbres, le pauvre Pellegrino ne soupçonna pas qu’il pût avoir en eux des ennemis mortels ; il se lia d’amitié avec les frères Carlone, et il allait souvent les voir travailler à l’église de l’Annonciade, dont ils