Page:Paul de Musset - Course en voiturin, Italie et Sicile, 1845, 2.djvu/226

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 218 —

bons ouvrages. Ce qui afflige encore plus que l’absence des talents, c’est de voir les louanges exagérées dont le public encense des tableaux tout à fait mauvais. On se demande ce que sont devenus ces connaisseurs sévères qui donnèrent la préférence à Michel-Ange débutant sur Léonard de Vinci à l’apogée de sa gloire. Il faut admirer à tout prix, s’extasier, décerner des couronnes. S’il n’y a rien de bon, n’importe ; on s’extasie néanmoins, on couronne quand même. On s’arrête devant une drogue, et on commence par vanter le bleu d’une robe ; la tête s’échauffe ; on admire un bras, une pose, un visage, et puis tout le tableau ; on s’écrie : « Voyez quelle variété de couleurs ! » On porte aux nues le bravo pittore, et quelquefois même on s’embrasse devant la toile par un transport de plaisir.

Pendant notre séjour à Venise, il y eut une exposition à l’académie des beaux-arts. On y voyait de tout, depuis le nez au crayon noir de l’écolier en bas-âge jusqu’au tableau d’église, et ces morceaux variés s’étalaient au-