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Nous passons le bourg de Fondi, renommé pour la beauté de ses femmes, et deux fois saccagé par les Turcs. Le corsaire Barberousse, débarquant sur la plage voisine pendant une nuit, pilla la ville, massacra les habitants et enleva les jeunes filles, qu’il emmena en Afrique. Il n’avait pas tout pris, car on en voit encore de fort belles. C’est à Fondi qu’on s’aperçoit du changement de territoire. Le sang de la Campanie disparaît de village en village. La taille des femmes devient plus élancée, la démarche plus grave ; les yeux s’agrandissent, les nez sont plus longs, plus fins, et la régularité classique règne sur les visages moins noirs et moins animés. La pétulance s’éteint peu à peu ; elle est remplacée par la majesté romaine. Le son de la voix est plus harmonieux, la parole plus lente ; il n’y a plus de dialecte, et vous êtes étonné d’entendre des paysans, des filles d’auberge et des facchini se servir de termes choisis. Vous les prendriez volontiers pour des grands seigneurs rejetés dans le peuple par des revers de fortune.