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ESCHYLE.

volante plane sur leurs boutiques, et la bourse pleine qu’elle agite, les excite aux luttes du trafic, comme le berger, frappant l’airain, met les ruches en effervescence. Il s’y réjouit de la criée des enchères, du mouvement des denrées, de la circulation des monnaies, des ruses de l’offre et de la demande. Il étend sa baguette sur les sacs et sur les amphores ; et voilà que figues et olives, huiles et safrans, étoffes et poteries, blés de la Béotie et vins de l’Archipel, quincailleries d’Égine et charbons de Mégare, tout cela va, vient, produit, fructifie, et retombe dans les comptoirs des marchands en piles de drachmes et en rouleaux de statères : le troupeau lui-même laisse une toison d’or aux mains de son pâtre.

Les trésors enfouis offensent Hermès comme réfractaires à l’échange universel dont il est l’âme. Il pousse le chercheur vers l’endroit ou gît la trouvaille il la fait jaillir sous sa main, de la pierre qui la recèle ou du silo qui l’enterre. — Ἑρμῆς κοινός ! « Part à deux ! Part à Hermès ! » s’écrie alors l’homme reconnaissant ; et le dieu sourit malignement dans l’ombre du visage que fera l’avare en trouvant sa cachette vide. La parole est l’échange suprême, et l’interprète des dieux doit avoir la langue habile et agile. Hermès est donc un dieu de l’éloquence, non point véhémente ni grandiose, mais persuasive et déliée : celle qui captive l’esprit en s’y insinuant.