Page:Pavlovsky - En cellule, paru dans Le Temps, 12, 19 et 25 novembre 1879.djvu/26

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Quelle nécessité cependant y a-t-il de prolonger ce temps de douleurs qui n’auront jamais ni fin ni limites ? Ne vaut-il pas mieux souffrir beaucoup pendant quelques jours, quelques heures ou quelques instants, et mettre un terme à tout, en être quitte à jamais ? Oui, cela vaut mille fois mieux ! Mais comment faire cependant ? Les murs de ma cellule sont lisses et unis — pas un crochet, pas un clou qui puisse m’aider à accomplir mon dessein. On ne donne pas de couteau à dîner, pas même de fourchette…

Je pourrais me pendre à l’espagnolette de la fenêtre ; mais le parquet crie et tremble à chaque pas que je fais ; à peine serai-je auprès de la fenêtre que la sentinelle le verra par le judas de la porte. Et puis où prendre une corde ou quoi que ce soit pour la remplacer ? On ne me donne pas de mouchoir de poche, ma serviette est remportée chaque matin dès que je m’en suis servi.

Un jour, comme je revenais d’un interrogatoire, ni le staroj, ni le factionnaire n’entrèrent dans ma cellule. Je profitai de cela, et en ôtant mes habits pour les échanger contre l’uniforme de la prison, je jetai mon cache-nez derrière la couchette, espérant que personne n’y prendrait garde. C’est ce qui arriva. Quand la porte se referma sur mes geôliers je saisis le cache-nez et le pressai sur mes lèvres. C’est de lui que me viendra la délivrance que j’attends et désire de toutes les forces de mon âme. Je cachai l’écharpe dans mon sein. La pensée qu’il était en mon pouvoir de faire cesser ma vie et mes souffrances à un moment donné me calma. Je