Page:Pavlovsky - En cellule, paru dans Le Temps, 12, 19 et 25 novembre 1879.djvu/8

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― Je ne puis le savoir ! fut la réponse.

― Hé ! dis donc ! est-ce déjà le matin ?

― Je ne puis le savoir !

Je compris qu’il lui était défendu de me parler, et partant je cessai mes questions ; mais je ne pus m’empêcher de ressentir un mouvement de colère pour l’humiliation que je venais de subir. Pendant que je me levais, on m’apporta du thé. Puis de nouveau un bruit de clefs, d’éperons… La porte se referme et pendant longtemps encore j’entends l’écho de pas qui s’éloignent. Enfin le jour parut. Je trouvai sur ma table un volume d’une revue réactionnaire, je me mis à lire, mais la lecture ne parvint pas à dissiper l’impression désagréable que m’avait fait l’insignifiant épisode du matin ; au contraire elle l’aggrava. Je jetai mon livre avec dépit et essayai de me promener dans ma cellule ; mais le plancher criait, je me heurtais à tout moment aux meubles ; à chacun de ces bruits insolites le factionnaire s’approchait à pas de loup de ma porte ; j’entendais grincer le châssis du judas qui y était pratiqué à hauteur d’homme, deux yeux y apparaissaient et se fixaient sur moi. Pour éviter cet espionnage je cessai de marcher, je m’assis sur la chaise en tournant le dos à la porte et, sans me rendre compte à moi-même comment cela se fit, je me mis à réfléchir aux circonstances qui m’avaient amené en ce lieu. Je décidai qu’il fallait me préparer à tout ce que l’avenir pouvait avoir en réserve pour moi : « Dieu nous a tous