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Page:Payen - Anthologie des matinées poétiques, t. 2, 1927.djvu/386

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De qui les soins m’offraient une aube pour aumône,
Les matins et les soirs, mes agneaux parfumas.
Je cueillais les aveux de son âme. J’aimais
Celle dont les pieds nus baisaient son gravier rose
Et qui, ceignant mon luth des murmurantes roses
Que sa main folle dérobait aux églantiers,
A l’heure où les flambeaux s’allument aux sentiers,
M’ouvrait un rêve aux herbes d’or de cette eau claire.
Des dryades riaient aux branches pour me plaire.
Les roseaux, connaissant le faune que j’étais,
Me couronnaient de leur feuillage et j’écoutais
La source en pleurs. Mais tant de fois, dans cet asile.
L’orage de sa voix sanglota mon idylle
Que, près de son cristal aube d’ormeaux mouvants.
L’on croirait, quand se tait le murmure des vents,
Que c’est, parmi les fleurs, mon âme triste et douce
Qui pleure, au lieu de cette source, dans la mousse.

LES ÉTOILES

Père ! je te revois un soir où les rosiers
Frissonnaient enivrés sous la brise d’Espagne,
Tu revenais avec ta faux de la montagne
Et je jouais auprès de ma berce d’osier.

Tu m’apportais les fleurs cueillies aux fauchaisons,
C’était au temps auguste où les seigles se dorent...
Une dentelle bleue pavoisait l’horizon,
Les fleurs arrondissaient ton bras comme une amphore

Tu me dis dans un rire à des larmes mêlé :
« Petit, voici les blés que l’on fauche à ton âge ! »
Et dénouant soudain ta veste de lainage,
Tu tendis les bleuets et les lys de tes blés.

Et je crus, quand neigea l’odorante gerbée,
Qui m’apportait des monts la sauvage fraîcheur,
Que tu venais du ciel, magnifique faucheur,
Car tes fleurs me semblaient des étoiles tombées !