— Curieuse question, docteur : pour savoir ce que j’avais.
— Nous en usons plus astucieusement pour savoir ce que c’est que les maladies sociales : nous allons chercher dans nos bons auteurs, dont quelques-uns sont morts depuis dix-sept ou trente-six ans, des renseignements complets sur ce qui nous arrive et quelques renseignements sur ce qui nous arrivera.
— Mon docteur médecin avait lu quand il était étudiant les bons auteurs de la médecine, de l’anatomie et de la physiologie animale et humaine, et de l’art médical. Puis il s’était tenu au courant des progrès médicaux. Il avait lu ce que les bons auteurs avaient écrit de la grippe. Il avait lu même les statistiques. Mais il ne se croyait pas dispensé pour cela d’examiner les cas particuliers et les cas nouveaux. Il examinait les cas nouveaux avec un esprit nouveau. Il n’avait pas des formules toutes faites et dispensatoires. Il m’ausculta moi-même. Il ne me dit pas du seuil de ma chambre : « Parfaitement, monsieur, vous avez la grippe : nous savons ce que c’est ; c’est connu, classé, catalogué, j’ai là une formule imprimée, copiée, dans un bon livre, et qui assure infailliblement la guérison, » Non, il entra posément et se dirigea vers mon lit en me regardant. Puis il regarda les journaux qui étaient sur mon lit. Mais il ne se servit de ses forces médicales que pour me donner remède. Et moi-même, citoyen, j’avais beaucoup de bonnes raisons pour ne marcher pas contre lui de toutes mes faibles forces. Il me demanda tous les renseignements qui lui étaient nécessaires pour établir son diagnostic.
— Vous lui avez répondu la vérité ?