Page:Peguy oeuvres completes 01.djvu/19

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
INTRODUCTION

réglementaires. La première terminée, il demanda un congé.

Péguy avait la hâte de l’action. Il possédait l’âme d’un chef, d’un entraîneur d’hommes. Ses camarades, ses amis, sentaient son autorité, l’acceptaient, la réclamaient.

Une anecdote exquise, qui se place dès sa première année de Normale, éclaire à cru la physionomie de Péguy, révèle son tempérament, son besoin d’agir et comme pour le satisfaire il sait concilier ce qui eût semblé à d’autres inconciliable. Un de ses camarades l’a décidé à devenir comme lui membre d’une Conférence de Saint-Vincent de Paul. Il y est à peine entré qu’on le supplie d’en accepter la présidence. Grave difficulté. Péguy qui n’a éprouvé aucun embarras à participer aux travaux d’une association catholique n’est pas croyant et il ne s’en cache pas. Or, à l’ouverture de chaque séance, le Président doit réciter la prière à haute voix. Péguy de se récuser. Qu’à cela ne tienne : il entrera en séance après que le vice-président l’aura récitée à sa place.

Jusqu’au bout, Péguy sera l’homme, de cette anecdote. Il écrira de la mystique chrétienne avec le respect, l’enthousiasme du catholique le plus docile. Mais il s’écarte des sacrements et il ne va pas à la messe.

Il est républicain, socialiste dès la première heure. Mais personne n’a déployé plus de franchise et de vigueur à fustiger les défauts et les tares du parti socialiste et du régime républicain.

La règle de sa vie qui en fait la profonde unité il la formule aux premières pages du premier des Cahiers : « Dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité,

11