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Page:Peguy oeuvres completes 02.djvu/267

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des indéfinités, des infinités, et des infinités d’indéfinités du détail dans l’ordre de la connaissance, et de la connaissance présente ; désormais transportés dans l’ordre de l’action, et de l’action présente, nous épuisons toute l’infinité de la création même ; toute sa forme de pensée, toute sa méthode, toute sa foi et tout son zèle, — vraiment religieux, — toute sa passion de grand travailleur consciencieux, de grand abatteur de besogne, et de bourreau de travail, tout son passé, toute sa carrière, toute sa vie de labeur sans mesure, sans air, sans loisir, sans repos, sans rien de faiblesse heureuse, toute sa vie sans aisance et sans respiration, toute sa vie de science et la raideur de son esprit ferme et son caractère et la valeur de son âme et la droiture de sa conscience le portaient aux achèvements de la pensée, le contraignaient, avant la lettre, à dépasser la pensée de Renan, à vider le contenu de la pensée moderne, le poussaient aux outrances, et à ces couronnements de hardiesse qui seuls achèvent la satisfaction de ces consciences ; il devait avoir un système, bâti, comme Renan devait ne pas en avoir ; il devait avoir un système, comme Renan devait nous rapporter seulement des certitudes, des probabilités et des rêves ; mais, sachons-le, son système était le système même de Renan, étant le système de tout le monde moderne ; et ce commun système engage Renan au même titre que Taine ; il fallait que Taine ajoutât, au bâtiment, à l’édifice de son système ce faîte, ce surfaîte orgueilleux, parce que ce que nous nommons orgueil était en lui un défi à l’infortune, à la paresse, aux mauvaises méthodes et au malheur, non une insulte à l’humilité, parce que ce que nous croyons être un sentiment de l’orgueil était pour